Sur l’Isthme de Courlande
Dame nature n’est pas une femme facile. A peine envouté par le son d’une extraordinaire concentration de cormorans, je me rends compte que le sous bois est maculé de gouano quand une salve blanche atterrit à un mètre de moi. Une pluie d’excréments célestes commence à s’abattre sur moi qui suis au beau milieu du no man’s land. Je prends mes jambes à mon cou et entamme un slalom entre les cimes les plus nidifiées. Ces salops me touchent par deux fois mais ma tignasse en réchappe immaculée.
Le reste de la ballade est nettement plus bucolique. Je longe la côte sans croiser ni marcheur ni chemin. Le spectacle est donné par des pins, des collinettes écossaises bronzées et des dunes vierges. Tout ce beau monde se jette dans les eaux calmes de la baie. J’ai l’impression d’être le premier homme à passer par là.
C’est fou ce que les paysages et les éléments suscitent. Quand je fais mes premiers pas sur la dune après avoir abandonné mes chaussures, mon coeur s’emballe, il ne me fallait pas plus qu’un gros paquet de sable et un petit bout de désert pour faire ressurgir les deux dernières années de ma vie. Tout le monde est au rendez-vous: visages, odeurs, endroits, histoires. Moi qui voulait voyager lentement, je fais le Lituanie – Mauritanie le plus rapide de l’histoire. Ne jamais sous estimer la puissance du décor.