Sauerland eldorado
Bienvenu au pays des cent colines. Certaines sont couvertes de pins, d’autres de grands feuillus, quelques champs de colza, de-ci, de-là. Les routes impeccables et les petits chemins déroulent leurs courbes entre l’obscurité des sous bois et les panoramas grandioses. Les villages ont des allures de hameaux et les villes ont des allures de villages, paisibles, les supermarchés occupent le rez de chaussée de maisons à collombages et on va à la banque commme on visite un voisin. Il n’y a pas de clôtures. Même l’imposante brasserie et l’usine de chaussettes s’intègrent dans cette harmonie buccolique. Ici on dirait que la campagne se porte bien, il y a de l’activité et on croise encore des jeunes sur des tracteurs.
“C’est au milieu de nulle part mais c’est au milieu” me dit Théo en me parlant de son village de Altenhellefeld. Ancien rédacteur en chef du Westphalen Post, le quotidien local, il a grandi et toujours vécu dans le Sauerland. Anne, sa madame vient de la ville d’à côté, à 7 kilomètres, institutrice dans l’école où elle était élève. Ce coin de l’Allemagne ils le connaissent par coeur et ils le sillonnent volontier à pied ou en vélo parce qu’ils y sont drôlement attachés.
En octobre dernier, la petite salle municipale d’Altenhellefeld a été requisitionnée pour accueillir huit jeunes hommes fuyant les zones de combats du Moyen Orient. Face à la situation des réfugiés, isolés, désorientés et recevant une aide financière insuffisante sans pour autant avoir le droit de travailler, certains habitants se sont mobilisés. Ils ont récupéré des vélos, des meubles et surtout organisé des fêtes et des activités pour intégrer leurs nouveaux voisins. Des écoliers du village s’improvisent aussi professeurs d’allemand le soir après les cours. Théo est de ceux là et passe plusieurs fois par semaine rendre visite aux réfugiés pour les aider avec les papiers ou juste pour discuter. Il sait que la maitrise de la langue est crutiale pour qu’ils s’en sortent. Ce n’est pas par compassion, il apprécie ces jeunes là, apprend d’eux aussi. Il ne veut pas parler de réfugiés mais d’invités et espère bien qu’un jour il seront ici chez eux. En attendant, le gouvernement analyse leur cas et ils ne savent pas si ils seront renvoyés ou si ils pourront rester pour enfin commencer à se reconstruire une vie. Théo dit aussi que l’Allemagne, avec sa population vieillissante, a besoin de ces jeunes invités.
Le vrai danger pour le Sauerland est le sapin de noël. Depuis quelques années, le commerce lucratif des “tenenbaums” est florissant et ils envahissent progressivement les colines. Problème, les arbres sont traités avec des pesticides et les épines accumulées sur le sol ne laissent pas bien pénétrer l’eau, ce qui appauvri la terre et entraine des ravinements. Alors quand viendra décembre, prenons garde à protéger ce très schönen ecke.